Prenez garde à cette jeune femme, elle pourrait devenir votre pire cauchemar. Pourquoi? Eh bien mademoiselle Blodwyn Wolfe est certainement une des rares jeunes femmes à autant exceller dans le domaine du "je me fais plus d'ennemis que d'amis". Et lorsqu'elle a un ennemi, mangue de bol pour lui, elle ne lâche pas si facilement. Son côté impulsif la pousse à s'attirer des ennuis sans les voir venir. Forcément, quand on passe son temps à râler après les autres ou quand on a un côté juste qui ressort trop facilement, les ennuis vous tombent dessus comme la pluie tomberait de ses nuages. Eh oui, Blodwyn, c'est ça: une demoiselle qui s'énerve pour un rien et qui s'attire de nombreux ennuis. Et d'ailleurs, en parlant d'ennuis, elle n'a jamais trouvé d'autre solution que son épée pour les résoudre. Ah oui! Je ne vous ai pas dit... Blodwyn est une amatrice des arts du combat. Que dis-je? Elle adore ça! Baignée depuis sa plus tendre enfance dans les armes, et si elle ne les maîtrise pas toutes, autant dire qu'elle reste tout de même une adversaire redoutable.

Malgré tout, la jeune femme reste une adorable personne. Sa loyauté est incomparable, et elle est parfois trop généreuse. Mais pour les gens qu'elle apprécie, elle ferait absolument n'importe quoi. A tel point qu'elle s'est déjà faite avoir de cette façon, mais cela n'a absolument rien changé à son comportement. C'est une personne joyeuse, une excellente compagnon de route. Qui plus est, elle aime parler, et ça se voit: on ne compte plus le nombre de vannes qu'elle sort dans la journée. Et bien entendu, elle déteste quand elle n'a pas le dernier mot. Sinon, ce ne serait pas amusant. Niveau discrétion, elle n'est pas forcément la meilleure... En fait, cela dépend de la situation. La discrétion lorsqu'il s'agit de combattre, et de ne pas se faire remarquer pour ne pas risquer sa vie, là, elle est plutôt douée. Lorsqu'elle a quelques difficultés à être discrète, c'est quand il s'agit de faire des gaffes... Elle est certainement la première à en faire... Malheureusement. Notre petit bout de femme est aussi très observatrice, et si vous croyez ne pas avoir été remarqué... Eh bien, vous vous trompez! Elle sait toujours ce qui se passe autour d'elle, et a parfois un coup d'avance sur les autres... A leur grand dam.

C'était toujours ce vieux souvenir qui hantait ses rêves. Toujours le même. Un mauvais souvenir, rien d'autre. Un souvenir qu'elle ne pouvait cependant pas oublier. Il était devenu sa raison de vivre. Et ce vieux souvenir était encore revenu cette nuit.

Il commençait toujours de la même façon. Ce jour-là, Blodwyn était partie en fin de journée, avec Terä, sa jeune jument, chez Allister O'Crowley, un vieil ami de sa famille. La jeune fille s'était très tôt passionnée par les armes, à force de voir son grand frère et son père s'entraîner. Elle avait très vite demandé à suivre les mêmes entraînements... Et son père n'avait jamais voulu. Alors, de temps en temps, elle allait chez Allister, et il lui apprenait quelques techniques à l'épée. C'était ainsi qu'elle s'était retrouvée loin de sa maison ce jour-là. Mais il était bien rare qu'elle y aille le soir. C'était d'ailleurs la première fois, et elle l'espérait, la dernière. Mais Allister l'avait prévenue, et il n'avait pu faire autrement.

Le rêve commençait au moment où elle rentrait chez elle. L'entraînement avait fini tard, et pour qu'il n'arrive rien à la jeune fille, Allister l'avait raccompagnée. Sur le chemin, ils n'avaient croisé qu'un cavalier noir, dont la monture, aussi noire que la cape que portait son maître, n'avait qu'une petite marque blanche sur le front. Un petit détail qui avait marqué la mémoire de la jeune fille, âgée de dix ans à l'époque. Quelle ne fut leur surprise lorsqu'ils découvrirent la maison de Blodwyn ce soir-là... Porte grande ouverte.

« Reste là. »

Apeurée, la petite fille ne put qu'écouter son maître. Parce que c'était ce qu'il était... Un maître. Il lui apprenait à manier les armes depuis plusieurs mois déjà, et elle avait fini par prendre l'habitude de l'appeler ainsi. L'homme resta dans la maison pendant plusieurs minutes. Plusieurs minutes qui parurent des heures à la petite fille. Allister ressortit, le visage décomposé. Le premier réflexe de Blodwyn fut de courir, et d'entrer dans la maison. Sauf qu'il l'empêcha d'entrer.

« Il vaut mieux que tu ne voies pas ce qui est arrivé ce soir. »

La rouquine n'eut pas besoin d'un mot de plus pour comprendre ce qui était arrivé. Un véritable massacre pour qu'Allister soit si affecté. C'était certain. Ils retournèrent chez le maître dans un silence total.

Blodwyn ouvrit les yeux. Comme chaque matin, elle se retourna dans son lit, et regarda le rayon de soleil qui transperçait sa chambre. Comme chaque matin, une larme coula sur sa joue. Une larme qu'elle essuya d'un geste vif. Cela faisait onze ans. Onze ans que c souvenir hantait ses nuits. Onze ans pendant lesquels elle n'avait oublié la monture qu'elle avait croisé ce soir-là. Car elle en était certaine, le cavalier était l'assassin de ses parents, et de son frère.

Elle s'était toujours bien entendu avec sa famille. Ses parents avaient toujours voulu faire d'elle la petite fille modèle, habillée d'une jolie robe, qu'on marierait à dix-sept ans, qui s'occuperait d'une maison... Et elle avait toujours rêvé d'une vie de chevalier, de combats, de voyage... Une vie qu'elle avait pensé ne jamais avoir. Et qu'elle avait eu grâce à Allister. Après la mort de sa famille, le maître d'armes l'avait adoptée. Il n'avait pas pu se résoudre à l'abandonner à son sort. Pas elle. Déjà, parce qu'elle était prometteuse en tant que "guerrière", mais surtout parce qu'elle était la fille de son meilleur ami. Et malgré son mauvais caractère, il avait réussi à la supporter toutes ces années. Il devait d'ailleurs être le seul à décerner cette petite lueur vengeresse qui éclairait le regard de Blodwyn. Une lueur qui ne s'éteindrait que le jour où l'assassin de ses parents serait mort, il le savait mieux que n'importe qui. Et cela ne l'avait jamais empêché d'apprendre à Blodwyn les techniques de combat, même s'il savait comment elle finirait par les utiliser. Il lui avait appris à utiliser chaque arme. Les points faibles et les points forts de toutes. Et là où elle ne montrait aucune faille, c'était avec deux épées en mains.

Blodwyn se leva, et s'habilla rapidement. Elle attrapa son épée en attendant les bruits d'entraînement à l'extérieur. Si sa famille était une famille Noble, Allister n'en était pas un. Et elle avait préféré reprendre le même statut que lui. Il était devenu son père onze ans auparavant... Il avait été si généreux, et finalement, elle lui avait un peu pourri la vie... Mais elle avait réalisé son rêve. Elle était devenue une excellente combattante. D'ailleurs, le petit combat entre l'élève et son professeur qui suivit fut une excellente preuve. L'élève avait surpassé le maître. Elle était prête.

« Lyn... Je crois qu'il est temps pour toi de quitter la maison. Je sais ce que tu comptes faire, et je te connais trop bien à présent pour t'en empêcher. »

« Vous savez très bien que vos mots n'atteindraient pas mon cerveau... »

« C'est bien pour ça que je ne t'empêcherai pas d'accomplir ton destin. J'ai fait quelques recherches... Et j'ai découvert que l'homme que nous avons croisé ce soir-là, il y a onze ans, réside à Camelot. »

« Je connais donc ma prochaine destination. »

C'est ainsi que Blodwyn se retrouva sur les routes pour rejoindre Camelot. Armée de deux épées, ses armes de prédilection, et sa meilleure façon de combattre, de Terä, et du dernier vestige de ses souvenirs en tant que véritable Wolfe: un pendentif représentant les armoiries de la famille. La vengeance est un plat qui se mange froid dit-on... Il aura fallu attendre onze ans. Mais elle était prête. Et rien ne pourrait l'arrêter.